Qu’y a-t-il de commun entre Alfred de Musset, Georges Sand, Honoré de Balzac et Marcel Proust ? De premier abord, vous me diriez l’écriture. Certains parleraient aussi de monuments de la littérature française. Et je n’y verrais rien à redire, mais ce n’est pas la bonne réponse. Car le récit que je vais vous conter a pour point commun entre ces quatre écrivains le voyage thermal. Et plus particulièrement un lieu situé dans le centre de la France appelé Mont-Dore.
En ce début de printemps 2022, j’ai eu l’occasion de séjourner quelques jours dans ce petit village d’à peine 1 300 âmes, curieux d’aller sur les traces de ces célébrités adeptes du thermalisme auvergnat, mais aussi de redécouvrir cette magnifique vallée des Monts Dore au pied du Puy de Sancy qui avait su bercer mon enfance et mes premières randonnées en montagne.
Les célèbres curistes du Mont-Dore
Je vous ai déjà parlé d’Alfred de Musset, de Georges Sand, d’Honoré de Balzac et de Marcel Proust. Mais le petit village du Mont-Dore a aussi accueilli des duchesses, des princes, des reines, des chefs d’Etats et au milieu du 20ème siècle une partie du gratin artistique français : Colette, Coco Chanel ont ainsi foulé les ruelles du Mont-Dore. Devenu en 1936 une station de ski très prisée, le village se transforma en une petite ville où il faisait bon séjourner. On y venait alors par le train (l’actuelle gare ferroviaire est fermée depuis 2015) et on aimait y résider dans de magnifiques hôtels. Le Mont-Dore compta à l’époque l’un des cinq plus grands palaces de France, le Palace Sarciron construit en 1907, que l’on peut voir encore aujourd’hui en face des célèbres thermes.
Les thermes du Mont-Dore
Jeune adulte, j’avais déjà eu l’occasion de visiter les thermes du Mont-Dore. J’avais cependant oublié à quel point elles impressionnent lorsqu’on pénètre le centre de ce petit village. La pierre sombre typique de l’Auvergne, la grandiloquence de la façade, la magnificence de la charpente (due à Gustave Eiffel) rendent le bâtiment massif mais élégant. Construit vers 1920 sous la direction de l’architecte Louis-Charles Ledru, ce serait encore actuellement les thermes les plus vastes d’Europe.
L’inspiration romaine du bâtiment est évidente, car l’histoire thermale du Mont-Dore remonte à bien longtemps : les eaux des monts d’Auvergne étaient déjà utilisées il y a plusieurs millénaires par les Celtes et les Romains. Quelques vestiges des thermes antiques ont d’ailleurs été retrouvés au fil des années. Très siliceuses, ces eaux du Mont-Dore permettent encore aujourd’hui de soigner l’asthme, des rhumatismes et les affections respiratoires.
Le funiculaire électrique du Capucin
SI vous venez un jour visiter le Mont-Dore, vous ne pourrez pas manquer le funiculaire du Capucin. Inscrit au titre des Monuments historiques et construit à la fin du 19ème siècle, c’est le plus ancien funiculaire à traction électrique de France. Il porte le nom de la montagne qu’il traverse et plusieurs sentiers de randonnées permettent aux courageux de le voir à flanc de montagne, à mi-parcours entre sa gare de départ et d’arrivée. Attention cependant, il ne fonctionne principalement que l’été (de mai à octobre). Ce funiculaire est enfin célèbre pour avoir été filmé par les frères Lumière (« La Montée du funiculaire »), tout comme d’ailleurs les fameuses thermes du Mont-Dore (« La Sortie des thermes »).
En route vers le Puy de Sancy
Avec les années, je me suis aperçu que les souvenirs de voyages sont parfois trompeurs. Plus on voyage, plus on vit des expériences incroyables, inédites, improbables parfois, rendant les souvenirs caduques dans leur intensité. Jeune adulte, j’étais ainsi très fier d’être monté seul en haut du Puy de Sancy depuis la vallée du Mont-Dore : une bonne quinzaine de kilomètres à parcourir, quelques centaines de mètres de dénivelé… A l’époque, je n’étais pas particulièrement sportif, et cette excursion m’avait paru être un exploit. Quelques années plus tard, je me rends compte de l’inexpérience de mes premiers voyages autonomes : si les nombreux itinéraires de randonnées dans cette vallée sont toujours magnifiques (surtout en ce mois de mars où la neige est encore présente), la pente n’est cependant jamais vraiment raide et le parcours plutôt facile. Monter en haut du Capucin depuis le village du Mont-Dore ne vous prendra ainsi pas plus d’une heure (sauf si comme moi vous faites de nombreuses pauses photos).
Depuis le Mont-Dore ou le Capucin, de nombreux sentiers vous mènent au pied du Sancy. Ma préférence va très nettement au sentier des artistes, avec ses petits filets d’eau jonchant le flanc montagneux et sa petite cabane propice à la contemplation. A sa sortie, vous pourrez admirer le Puy de Sancy, ce point culminant du Massif Central. C’est à cet endroit que se trouve les deux sources de la Dordogne : la Dore et Dogne. Vous verrez également toute proche la station de skis et ses nombreux télésièges et autres téléfériques. Elle fut la troisième station créée en France et fut financée par l’aviateur Dieudonné Costes, célèbre pour avoir été le premier à traverser l’Atlantique d’Est en Ouest.
Avant la station, je vous conseille de bifurquer sur la droite en direction du Val de Courre vers la Réserve Naturel de Chastreix-Sancy : verdoyante l’été, cette vallée est absolument magnifique au début du printemps, où la neige encore présente sur les sommets côtoie la flore aux teintes automnales : on se croirait dans un paysage de film fantastique ! Et avec un peu de chance, vous pourrez même observer mouflons, chamois et autres marmottes.
Vers le ruisseau de l’Enfer
Belle promesse que d’aller en Enfer ! Autour du Mont-Dore, vous aurez le choix d’observer plusieurs cascades, dont la plus haute du Massif Central (une trentaine de mètres). Mais l’itinéraire qui avait attiré mon attention lors de mon séjour se situe sur le versant oriental de la vallée du Mont-Dore.
Après une heure de marche depuis le village, j’empruntais un sentier longeant un ruisseau avec trois étapes en « cascade » : au plus loin se trouve la cascade du Saut du Loup (la moins photogénique de mon point de vue), puis en revenant sur mes pas, les cascades de Queureuilh et Rossignolet. Ces dernières méritent de s’y arrêter et d’observer un spectacle vivant de ce que la nature a de plus précieux : l’eau, élément si vital pour l’homme et pour cette vallée thermale du Mont-Dore.
Car si le curiste se fait plus rare ici depuis quelques années, le village du Mont-Dore a ce charme des grandes dames toujours belles. On y vient pour se reposer auprès d’elle, prendre des forces avant un nouveau voyage. Exactement ce que je recherchais en venant ici.
